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Surpêche en Afrique de l’Ouest: «Si vraiment les décideurs voulaient y mettre fin, ils pourraient le faire»

La surpêche ne touche pas seulement la Gambie : dans les eaux ouest-africaines, chaque année, 500 000 tonnes de poissons destinés aux marchés étrangers sont pêchées, le long de la Mauritanie, du Sénégal ou encore de la Sierra Leone. Le Docteur Aliou Ba est responsable de la campagne Océans chez Greenpeace Afrique. Pour lui, à l'origine de ces pratiques devenues endémiques, il y a surtout un manque de volonté politique. Entretien.

RFI : Docteur Aliou Ba, la surpêche en Afrique de l'Ouest est régulièrement pointée du doigt, sans qu'on arrive à mettre fin à cette pratique. Pourquoi ?

Aliou Ba : Si vraiment les décideurs voulaient mettre fin à ce phénomène, ils pourraient le faire à travers l'application de loi et de règlements, par exemple investir sur les patrouilles de surveillance des côtes ouest-africaines pour qu'on en finisse avec ce fléau.

À cause de ce manque de surveillance, il y a ces navires qui arrivent dans les eaux ouest-africaines, certains sans licence, en toute illégalité. Est-ce que c'est un phénomène qui prend de l'ampleur ?

Il y en a vraiment beaucoup. La dernière fois c'était en février ; un bateau qui battait pavillon russe était venu dans les eaux sénégalaises et guinéennes. Il a pêché pendant environ deux semaines sans pour autant être inquiété. Ce navire n'était pas répertorié au Sénégal, il n'avait pas de licence au Sénégal, ni en Gambie, ni en en Guinée. Il y a deux semaines, il y a aussi eu un conflit entre ces navires industriels et les pêcheurs artisans. Actuellement, les navires industriels ont décimé les stocks qui leur ont été alloués. Donc, aujourd'hui, ils sont en train de de pêcher dans des zones qui sont réservées à la pêche artisanale, ce qui est source de conflits.

>> À lire aussi : Reportage Afrique - Côte d'Ivoire: À Grand-Bereby, la lutte contre la pêche irresponsable s'organise (1/2)

En mer, les pêcheurs artisanaux se trouvent donc avec moins de stocks, privés d'activités. C'est source de tensions...

Là, on arrive vraiment à un point inquiétant parce que les pêcheurs artisans se trouvent parfois à monter sur ces navires industriels et font descendre les capitaines. On ne sait pas, ils peuvent se battre, ils peuvent même s'entretuer. C'est pour cela que les États devraient vraiment travailler à éviter ce type de situation.

>> À lire aussi : Pêche: dans les eaux sénégalaises, un bateau-usine russe sème le trouble

Qu'est-ce qui devrait être mis en place pour endiguer ces pratiques ?

Il faut contrôler, il faut permettre à la ressource de se régénérer en mettant en place des mesures de gestion. C'est à dire éviter ou bien interdire l'utilisation d'engins destructifs. Il faut aussi diminuer le nombre de navires industriels qui viennent faire des intrusions et pêcher au détriment des communautés et même des États, parce que tout le monde perd dans cette situation.

En Gambie, les pêcheurs locaux n'arrivent plus à vivre de leur activité et manquent de nourriture, selon un rapport d’Amnesty International

Au large des côtes gambiennes, les eaux regorgeaient encore il y a peu, de sardinelles et de bongas. Deux espèces à la fois source de revenus pour les habitants du littoral mais aussi consommées comme principale protéine animale, selon Amnesty International dans un rapport publié ce 31 mai 2023.

Cependant, à Sanyang, il faut aller de plus en plus loin en mer pour attraper de moins en moins de poissons.

À l'origine de cette raréfaction, d'abord, les bateaux industriels – européens, asiatiques, américains, mieux équipés que les pêcheurs traditionnels. Les filets de ces navires-usines ratissent en masse les fonds marins, certains sans autorisation.

Depuis 2017, une autre pression pèse sur les réserves : la demande venue d'une usine de farines et d'huiles de poissons installée sur le littoral.

Des transformateurs aux restaurateurs et commerçants de Sanyang : tous racontent à Amnesty leurs difficultés à acheter du poisson, dont le prix a grimpé en flèche.

L'ONG pointe une situation « dévastatrice » pour les populations locales. Et estime que leurs droits au travail, à la santé et à un niveau de vie décent ne sont pas garantis dans de telles conditions.

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