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Gaza: le conservatoire palestinien célèbre la musique malgré les défis du blocus et les obus

Quelques jours après la fin de la dernière offensive israélienne début mai, le conservatoire national palestinien Edward Saïd, à Gaza, a organisé un concert de oud sur les décombres d’une maison détruite par une frappe israélienne pour fêter la résilience en musique. Cette école de musique héberge plusieurs orchestres et a également plusieurs sections : à Jérusalem, Bethléem et Ramallah, notamment. Mais l’école de Gaza subit le blocus, comme le reste de l’enclave palestinienne, et fait face à de nombreux défis.

De notre envoyé spécial à Gaza,

Des notes mélodieuses, dans un paysage sinistre, un amas de béton, une poussière grise recouvre le sol et les arbres. Des structures métalliques tordues, le squelette apparent d’une maison, soufflée par la violence d’une déflagration : au milieu des gravats, un groupe de oud formé par six musiciens, keffieh palestinien sur les épaules, procèdent à une performance artistique supervisée par Manel Awad.

« Notre message est très clair, explique la directrice du conservatoire musical de Gaza. Nous sommes là pour dire : nous sommes des gens qui aimons la vie. Malgré toutes ces destructions, nous persévérons, nous vivons. Nous sommes un institut de musique, et donc notre langage, la musique, est universel. À travers la musique, nous parlons au monde entier, peu importe nos différences. »

« Chaque année, de nouveaux élèves rejoignent notre conservatoire, pour apprendre à jouer d’un instrument. Nous aimons la vie, l’art, la culture, nous voulons vivre normalement. C’est la nature même de l’être humain. Le peuple palestinien n’a rien de différent des autres peuples, il se distingue uniquement par la souffrance singulière qu’il subit : l’occupation, les agressions, les bombardements… Nos enfants meurent, et leur seul tort est de vivre sur une terre confisquée. »

C’est jour d’audition au conservatoire national Edward Saïd de Gaza. Cette école de musique porte le nom d'un intellectuel, essayiste et musicologue palestino-américain décédé en 2003.

« Nous vivons sous pression permanente, la musique me permet de m’évader »

Une centaine de candidats veulent rejoindre l’institut cette année, lors d’un entretien :

- Nom et prénom ?

- Ahmed Zaquoute.

- Votre âge ?

- 32 ans.

- Interprétez-nous ce que vous voulez.

« Je suis diplômé en sociologie, j’ai fait plein de petits boulots. Il n’y a pas vraiment de travail ici. Là, je suis au chômage, explique Ahmed Zaquoute. J’aime vraiment la musique, mon père m’a fait écouter de la musique dès le berceau. Ma mère lui disait "mais qu’est-ce que tu fais ? C’est un bébé, il ne peut pas comprendre". Il lui répondait "mais au moins, il aura une oreille musicale". Et donc j’ai grandi en écoutant les divas arabes, Oum Kalthoum et Faïrouz. J’aime la musique, et mon cœur est empli de musique, j’aime tellement la variété arabe. Et je vais être honnête avec vous : à Gaza, il n’y a rien à faire, donc rejoindre cette école est une échappatoire. Nous vivons sous pression permanente, la musique me permet de m’évader. »

Les auditions s’enchaînent. Stressé, le jeune Joumaa, 20 ans à peine, se prépare à entrer en scène : « J’aimerais perfectionner ma technique, pour concrétiser ma passion. Si je parviens à entrer au conservatoire, ça sera un premier pas. Ça me permettra de prouver ce que je vaux, et ensuite de partir à l’étranger. Évidemment, on peut vivre à Gaza, mais dans quelle condition ? Ici par exemple, on n’a même pas de grands festivals ou une fête de la musique. »

Et pourtant, ce ne sont ni les initiatives, ni la volonté qui manquent : le conservatoire national palestinien Edward Saïd organise régulièrement des concerts. Mais à Gaza, sous blocus israélo-égyptien, tout est un défi : rien que l’importation d’instruments musicaux est un véritable casse-tête, confie la directrice de l’institution.