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Pérou: trois ans après son premier cas de Covid, le pays panse encore ses plaies

Il y a trois ans, le Pérou découvrait ses premiers cas de covid et s’enfonçait dans un confinement strict de quatre mois. C'est depuis le pays le plus endeuillé du monde avec plus de 600 morts pour 100 000 habitants. Le système de santé n’a pas pu absorber le choc, l’oxygène a manqué, des patients sont morts devant les portes des hôpitaux. Trois ans après la première vague, le pays panse encore les cicatrices laissées par cette pandémie. 

Dans les rues de Lima, il n’y a plus que quelques passants qui portent encore le masque, voire le double masque, obligatoire jusqu’en septembre dernier. Mais, pour beaucoup, impossible d’oublier la pandémie qui a fait 219 000 morts dans le pays. Au Pérou, tout le monde ou presque connaît quelqu’un décédé du covid. La maladie a emporté la femme d’Antonio, 54 ans, dès la première vague, en 2020 : « La mère de mes enfants est morte, mais aussi plusieurs membres de ma famille, des tantes, le frère de ma mère est mort aussi du covid. Cela m’a beaucoup affecté, ça a été terrible de perdre ma famille et mon épouse, et voir mes enfants comme ça, sans personne pour leur faire à manger, pour s’en occuper ».

100 000 enfants ont perdu au moins un parent

Depuis la mort son épouse, Antonio a déménagé avec ses deux enfants dans le quartier pauvre de San Juan de Lurigancho, à Lima. Sa fille Naomi, 16 ans, fait partie des 100 000 enfants orphelins d’un parent depuis la pandémie : « Ça a été très dur pour moi de perdre ma mère, j’avais toujours vécu avec elle. Cela m’a beaucoup déprimé. Nous avons dû apprendre à créer plus de lien avec notre père, à nous aimer, c’était moins le cas avant ».

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Presque la moitié de ces enfants reçoivent une aide du gouvernement : 50 euros par mois et les visites par une assistante sociale. Celle de Naomi l’aide à trouver une formation. Les deux ans d’école à distance ont fait beaucoup de dégâts et l’adolescente a abandonné les études : « On est beaucoup à ne pas avoir bien étudié, moi je n’arrivais pas à me concentrer, il se passait tellement de choses autour. Et on avait perdu nos amis, l’interaction sociale ».

Séquelles psychologiques

Naomi a guéri de sa dépression. Mais de nombreux adolescents ressentent encore des séquelles psychologiques comme de l'anxiété ou encore des troubles du comportement, comme le constate Deissy Orellana, assistante sociale : « Au début, c’était dur. De nombreux adolescents ont réprimé leurs sentiments, ils refusaient de s’exprimer. J’ai vu beaucoup de familles détruites, désunies. Le papa était mort. Il n’y avait plus de revenu, les mères devaient sortir travailler, et il ne restait personne pour s’occuper des enfants ».

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En plus du deuil, les familles ont dû composer avec les conséquences économiques de la pandémie. Quatre mois de confinement en 2020, des restrictions jusqu’à l’année dernière. Les plus pauvres ont le plus souffert, explique l’économiste Hugo Vega : « En termes de PIB, nous sommes 4% au-dessus du PIB de 2019 et la consommation a augmenté de 5 %. Mais les revenus n’ont pas rattrapé l’inflation. Pendant la période d'immobilisation sociale, les 30 % d’habitants les plus pauvres ne pouvaient pas sortir pour travailler et faire du télétravail. Ils ont été les plus affectés en 2020 et ont le moins récupéré en 2021. Le taux de pauvreté est retombé aujourd’hui à 26% mais cela reste au-dessus des niveaux pré-pandémie ».

Crise politique et sociale

Pour Deissy Orellana, l’assistante sociale, il y a tout de même des raisons d’espérer des jours meilleurs, trois ans après le début de la pandémie : « Je vois beaucoup de résilience dans les familles. Après un an d’accompagnement, je vois des familles plus fortes, certains ont retrouvé un emploi, ils se sont réorganisés ».

Une résilience nécessaire pour affronter les nouveaux défis du pays : inflation, insécurité alimentaire, montée des prix de l’énergie et depuis plusieurs semaines, une importante crise politique et sociale