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France: les associations redoutent la hausse des expulsions avec la fin de la trêve hivernale

Après une année 2022 marquée par un record d'impayés de loyers en raison de l'inflation et de la crise de l'énergie, les associations craignent que le printemps accentue la « stigmatisation des locataires » et des ménages les plus modestes.

La trêve hivernale prend fin ce vendredi 31 mars à minuit, ce qui signifie qu'il sera de nouveau possible d'expulser des locataires de leur logement après cinq mois d'interdiction de cette mesure, sauf exceptions, imposée par la loi. Les associations redoutent une multiplication des expulsions de locataires pour cause d'impayés de loyers, l'inflation ayant mis à mal le budget des plus modestes.

« On est très inquiets parce que la situation sociale s'est dégradée avec la montée des prix de l'énergie et de l'alimentation ces derniers mois,résume pour RFI Manuel Domergue, directeur des études à la Fondation Abbé Pierre. On sait que ça a un impact très fort, essentiellement sur les ménages populaires. Ça se traduit déjà par une montée des impayés de loyer, par exemple dans le parc HLM. Il se trouve qu'avec la fin de la trêve des expulsions, les ménages qui avaient cette épée de Damoclès au-dessus de la tête sont en risque d'expulsion dans les mois qui viennent. Et du côté du gouvernement, on a l'impression que l'heure est plutôt à la fermeté, pour ne pas dire à la stigmatisation des locataires. »

Alors que la période de trêve avait été prolongée durant la crise du Covid en 2020 et 2021 – diminuant nettement le nombre d'expulsions à 8 100 en 2020 et 12 000 en 2021, contre 16 700 en 2019 –, les associations craignent désormais que le nombre d'expulsions reparte à la hausse, du fait de la « précarisation » des ménages modestes en raison de l'inflation. Pour contrer cette hausse des prix, la Fondation Abbé Pierre a demandé un triplement du chèque énergie et une hausse des APL pour soutenir les plus modestes.

Un record d'impayés en 2022

Malgré le bouclier tarifaire mis en place pour contenir la flambée des prix, les interventions pour des impayés de gaz ou d'électricité ont battu un record au cours de l'année 2022. « Malgré le bouclier tarifaire et l'attribution de chèques énergie complémentaires, le nombre d'interventions pour impayés a augmenté en 2022 : 863 000 ont été mises en œuvre, soit une hausse de 10% par rapport à 2021 », a annoncé ce 30 mars le médiateur de l'énergie. C'est le niveau le plus élevé depuis que le médiateur recense ces interventions en 2015.

Mais parallèlement, et pour la première fois, une baisse du nombre de ménages en impayés qui ont subi une coupure d'électricité a également été constatée en 2022. Le nombre de foyers coupés a été ramené à 157 000, contre 254 000 en 2021, soit une baisse de 38% selon le médiateur qui précise que l'évolution est principalement le fait de « quelques fournisseurs, notamment EDF ».

Depuis le 1er avril 2022, le premier fournisseur d’électricité en France a en effet choisi de ne plus suspendre l'alimentation électrique en cas d'impayés de ses clients, mais de réduire leur puissance à 1 kVA ou 3 kVa, peu importe la période de l'année. Suffisant pour allumer une ampoule, recharger son téléphone, conserver des aliments et médicaments au réfrigérateur ou faire des démarches pour régulariser sa situation. Une « avancée sociale » saluée par la Fondation Abbé Pierre qui milite pour une loi sur l'abolition totale des coupures dans les résidences principales.

Le projet de loi contre les squatteurs inquiète

Ce n'est pas le seul sujet d'inquiétude pour les associations. L'effet potentiel de la proposition de loi du député macroniste Guillaume Kasbarian, examinée actuellement en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, pourrait encore empirer la situation. Elle prévoit de durcir les sanctions contre les squatteurs et d'accélérer les procédures en cas de loyers impayés.

Un texte jugé « cruel » et « d'une grande brutalité sociale » par Jean-Baptiste Eyraud, le porte-parole de l'association Droit au logement (DAL). « S'il est adopté, il fragilisera la prévention des expulsions, les mécanismes actuels ne pourront plus fonctionner et les choses iront beaucoup plus vite », a-t-il déploré à l'AFP. L'association organise un rassemblement ce 1er avril sur la place de la Bastille, à Paris, pour dénoncer ce texte et défendre plus largement le droit au logement pour tous.

Se reloger reste un casse-tête pour les ménages précaires. Selon une étude de la Fondation Abbé Pierre portant sur 66 ménages expulsés, 32% d'entre eux n'avaient pas retrouvé de logement fixe un à trois ans après leur expulsion.

(Et avec AFP)