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Effractions dans le réel: retour sur le festival littéraire 2023 du Centre Pompidou

Du 8 au 12 mars s'est tenu au Centre Pompidou le festival littéraire annuel Effractions, consacré au bouillonnement du réel à travers le prisme de la fiction contemporaine. Une quarantaine d’auteurs français et internationaux ont participé aux débats et rencontres, qui furent souvent passionnants et passionnés.

Le rideau est tombé ce dimanche sur la 4e édition du festival littéraire Effractions organisé par la Bibliothèque publique d’information (BPI) du Centre Pompidou, à Paris. Devenu un rendez-vous littéraire incontournable de la capitale, le festival est revenu, le temps de cinq après-midis et soirées, sur les ouvrages parus au cours de l’année éditoriale 2022-2023 et les thématiques abordées par leurs auteurs. Les sujets vont de l’écologie aux guerres, en passant par des thématiques sociétales relatives notamment au monde du travail.

Le festival a donné la parole cette année à une quarantaine d’auteurs dont certains primo-romanciers, mais aussi à plusieurs autrices reconnues telles que Brigitte Giraud, Marie Ndiaye, Lola Lafon ou Marie-Hélène Lafon, qui, dans le cadre de grandes interviews, ont évoqué la place du réel dans leur œuvre. Parmi les autres grands noms francophones présents au centre Pompidou ce weekend, citons pêle-mêle Mathieu Belezi, Makenzy Orcel,  Eric Faye et Sorj Chalandon.

Brigitte Giraud, Lola Lafon, Marie NDiaye, Marie-Hélène Lafon et Sorj Chalandon.
Brigitte Giraud, Lola Lafon, Marie NDiaye, Marie-Hélène Lafon et Sorj Chalandon. © Pascal Ito, Flammarion/Lynn S.K./Francesca Mantovani, Gallimard/Olivier Roller/JF Paga/Montage RFI

En cohérence avec l’identité de la BPI

Penser le lien entre la littérature et le réel, telle est la mission que s’est assigné ce festival parisien, comme son nom le rappelle : Effraction – réel/fiction. « Festival de littérature contemporaine, Effractions met en avant des œuvres et des auteurs qui prennent à bras le corps cette matière bouillonnante qu’est le réel, explique Blandine Fauré, responsable des programmations littéraires au sein de la BPI. En créant le festival il y a quatre ans, nous avons voulu qu’il soit en cohérence avec notre identité à la BPI, qui est une bibliothèque tournée vers l’actualité littéraire. Il s’inscrit en écho au festival iconique du Cinéma du réel que le Centre Pompidou organise depuis bientôt 45 ans ».

Or le réel se décline de différentes façons, en fonction des auteurs et des sensibilités. Il est intime et introspectif dans l’œuvre de Brigitte Giraud, prix Goncourt 2022, qui a ouvert la nouvelle édition d’Effractions. Le réel cohabite avec l’étrange et le fantastique dans les pages de Marie Ndiaye, il enjambe les temps et les continents dans l’œuvre de l’Haïtien Mackenzie Orcel, il est politique et dénonciateur dans le récit de fuite et d’espérances que raconte l’Iranienne Nasim Marashi ou encore historique dans la trilogie que consacre Mathieu Belezi à la colonisation en Algérie, racontée à travers le prisme de viols et de violences… « Par notre choix d’invités, représentatifs de la littérature du réel à l’honneur dans ce festival, nous voulions explorer ces différentes approches et donner à voir et entendre les mille nuances du réalisme contemporain », ajoute Blandine Fauré.

Entre grâce et espérance

Faisant le bilan de l’édition 2023 d’Effractions, les organisateurs se targuent d’avoir réussi à créer un événement qui draine le public, venu nombreux encore une fois cette année à la rencontre des auteurs, « malgré la grève des transports en commun ». Il n’y a pas eu d’annulations, comme on pouvait s’y attendre en période de mouvements sociaux majeurs que la France connaît depuis quelques semaines.

Les romans présentés au festival Effractions 2023.
Les romans présentés au festival Effractions 2023. © Benoît Cottet, CPI

L’intérêt du grand public pour ce rendez-vous littéraire pas comme les autres s’explique sans doute aussi par sa programmation originale, répartissant les débats selon des formules aussi variées que dynamiques. Les rencontres avec les auteurs sont déclinées selon cinq axes : un écrivain dialoguant avec un spécialiste d’une autre discipline autour du sujet central de son œuvre dans « Collusions », l’axe « Regards croisés » qui réunit des auteurs inspirés par une thématique proche, « Chantier de fouille » consacré au pré-texte et à la documentation, « La revue de presse de l’écrivain » qui questionne le rapport de l’auteur à l’actualité et à la presse, et enfin, l’axe « À voix haute » qui fait entendre des extraits représentatifs du texte présenté.

Les lectures sont particulièrement populaires auprès du public CPI. Les spectateurs se souviendront longtemps de la lecture des extraits du roman de Mathieu Belezi par l’acteur Charles Berling, faisant entendre la rage, le désespoir et l’espérance des colonisés. Ce fut un véritable moment de grâce, comme il y en a eu quelques autres. Notamment la rencontre, dans le cadre d'un grand entretien, avec l’inoubliable Marie Ndiaye commentant les premières phrases de ses romans, et évoquant les origines de sa fiction et son souci de « donner leurs chances à tous les personnages ». Enthousiasmant fut aussi le débat entre l’essayiste du soleil Emma Carenini et le romancier Miguel Bonnefoy, auteur de la biographie romancée du premier inventeur du système d’exploitation de l’énergie solaire, un débat se situant résolument au carrefour de la philosophie, l’histoire et l’écriture. 

Pour nombre de spectateurs, la rencontre la plus marquante de cette édition a été celle avec l’Iranienne Nasim Marahi dont le roman L’automne est la dernière saison (Zulma) raconte les contradictions de la société iranienne, le rêve de ses révolutionnaires et la liberté à l’horizon. Entre grâce et espérance !  

 Effractions, festival de littérature contemporaine. Du 8 au 12 mars 2023, à la Bibliothèque publique d’information du Centre Pompidou-Paris.