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Après la crise du Covid, les nouveaux défis du tourisme mondial

Guerres, soulèvements, inflation, changement climatique, Covid, tous ces événements mondiaux ont des répercussions plus ou moins importantes sur la vie quotidienne des quelque 7,9 milliards de Terriens. Et le secteur du tourisme n’est pas en reste.

La page de la crise sanitaire mondiale du Covid, qui a littéralement plombé le tourisme mondial, n’est pas encore totalement tournée que déjà un nouveau drame vient contrarier depuis un an le domaine du tourisme : la guerre en Ukraine et ses multiples conséquences.

Il est tôt pour évaluer l'impact de l'offensive militaire russe en Ukraine, mais ceci représente un risque majeur pour le tourisme international qui pourrait retarder la reprise déjà faible et inégale du secteur, selon l’Organisation mondiale du tourisme. En 2022, les touristes internationaux ont été plus de 900 millions (deux fois plus qu’en 2021 mais toujours à 63% des niveaux d'avant la pandémie). 

« Dès le début de la guerre, tout de suite, dès le lendemain de la déclaration russe, de la frilosité est apparue chez les touristes français », affirme Marianne Chandernagor, directrice du Salon mondial du tourisme qui se tient actuellement à Paris. Une inquiétude qui semble, avec le temps et la pérennité du conflit, s’être cependant quelque peu dissipée, même si les agences proposant des voyages en Russie ou en Ukraine ne sont cette année plus présentes dans les couloirs du salon. « Il y a eu un coup d’arrêt des réservations, poursuit Marianne Chandernagor, même vers des destinations très éloignées de la zone de guerre. »

« En Roumanie, même à la frontière ukrainienne, il n’y a pas d’impact visible du conflit. Mais il y a tout de même une certaine peur et des annulations de la part des touristes étrangers », affirme Mihaela Mihet, responsable de l’Office de tourisme de Roumanie en France.

Des crises à contourner

Et il en va de même pour l’Iran. La destination, très prisée il y a encore six mois, est dorénavant boudée des touristes suite au soulèvement populaire anti-gouvernemental engendré par la mort de Mahsa Amini en septembre 2022 et à la féroce répression qui se poursuit. Mais les voyagistes anticipent et apprennent à se diversifier. « Nous avons dû stopper nos quatre offres de voyages en Russie, raconte l’un des membres de l’agence Tirawa, spécialisée dans le voyage d’aventure, mais surtout, nous avons depuis plusieurs années dû arrêter la Syrie et le Yémen, hauts lieux touristiques, et depuis quelques mois cesser de proposer le Pérou comme destination depuis que le pays est secoué par une crise politique sans précédent. »

Pour ne pas sombrer, les agences doivent donc étendre leur palette de destinations afin de ne pas être prises au piège d’un conflit soudain ou d’une catastrophe climatique. Sans oublier de prendre en compte le coût de ces voyages. Et l’agence Tirawa d’expliquer que les ventes pour l’Asie centrale ont drastiquement baissé à cause de l’augmentation des prix des vols ; il est désormais impossible de survoler la Russie et l’Ukraine et le temps de trajet pour rejoindre les pays d’Asie centrale a ainsi considérablement grimpé.

« La situation est politiquement stable dans notre région, mais les touristes ont très peur de prendre désormais l’avion et de passer non loin de la zone de guerre », déplore la responsable du stand Zamin Travel Uzbekistan. « Ça va un peu mieux aujourd’hui, les gens s’habituent à la guerre, mais on a toujours du mal à les rassurer, même si nos vols passent non plus par Moscou, mais par Istanbul. »

Si les touristes désertent la Russie et l’Ukraine, les Russes ne partent plus non plus en vacances dans un certain nombre de pays, au grand dam de certaines régions comme la Turquie, mais aussi la Côte d’Azur, où l’impact économique se fait grandement sentir. Désormais, à cause des sanctions, les Russes s’envolent vers la Mongolie, les Maldives ou encore les Seychelles. En 2019, les dépenses russes en voyages internationaux avaient atteint 36 milliards de dollars. « Par ailleurs, à cause du Covid, mais aussi de la guerre, de nombreux touristes chinois ou japonais voyagent de moins en moins », raconte la directrice du Salon mondial du tourisme. Les raisons sont donc sanitaires, géopolitiques, mais aussi climatiques, explique-t-elle.

Voyager et protéger la planète...

La mode est aujourd’hui à l’écotourisme, aux voyages écoresponsables, aux voyages équitables profitant aussi bien aux populations locales qu’aux ressources naturelles et culturelles du pays. Et dans les allées du salon, les stands prônant ce nouveau genre de tourisme font florès, car les destinations « nature » sont désormais les plus demandées. L'heure est donc au voyage tout en prenant soin de la planète, moins souvent, mais plus longtemps. Deux personnes faisant l’aller-retour Europe-États-Unis contribuent autant au changement climatique que la consommation moyenne de gaz et d’électricité d’un foyer sur toute une année, une donnée qui en fait réfléchir plus d'un.

En effet, le tourisme serait responsable de 8% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde, selon une étude publiée dans la revue scientifique Nature Climate Change. Si les principaux pôles de pollution sont les trajets en avion (¾ des émissions de gaz à effet de serre du secteur du tourisme proviennent des transports), l’alimentation et l'hébergement doivent aussi être pris en compte.  

Et les voyageurs sont dorénavant appelés à se demander comment compenser leur empreinte. Pour ce faire, ils peuvent désormais financer un projet réduction d’émissions de gaz à effet de serre ou de séquestration du carbone (projet de reforestation, de développement d’énergies renouvelables, d'amélioration de la gestion des déchets…).

Pour autant, le premier critère d’un voyage demeure le budget, suivi le plus souvent par la sécurité. « Quand on demande aux touristes où se situe la problématique environnementale dans leur choix de vacances, de plus en plus d’entre eux admettent la prendre désormais en compte dans leur décision », explique Marianne Chandernagor qui tient toutefois à y mettre un bémol : le décalage entre le souhait et la pratique persiste. Les touristes veulent protéger la planète, mais ils veulent avant tout voyager.

L’optimisme reste de mise

Et « aujourd’hui, l’engouement est reparti, comme une impression qu’on "fait avec" », poursuit Marianne Chandernagor. « Le tourisme se porte bien, en réalité. On pensait avoir à vivre une révolution des usages avec toutes les crises, mais en fait non. Il y a comme une réelle envie de revanche de la part des voyageurs. » Et Marianne Chandernagor de noter que les réservations pour 2023 dépassent même celles de 2019, et ce, malgré l’inflation qui bondit. Parce que le voyage reste pour tous un moyen de s’évader, et pas uniquement physiquement.

D'après les scénarios prospectifs établis par l'OMT pour 2023, les arrivées de touristes internationaux pourraient atteindre de 80% à 95% de leurs niveaux d'avant la pandémie cette année, en fonction de l'ampleur du ralentissement économique, de la reprise en cours des voyages en Asie-Pacifique et de l'évolution de l'offensive russe en Ukraine.